La rééducation, c’est un univers particulier, un cocon bien douillet, on travaille, on revit, on transpire, on fait des efforts, on se retape, on rit parfois, on peut pleurer aussi les uns à côté des autres… En se regardant un peu ou pas du tout, il y a ceux qui ne sont que de passage et ceux qui resteront plus longtemps…
En 5 mois, j’en ai vu, croisé des hommes et des femmes de tous les âges en rééducation pour différentes pathologies. (A.V.C., traumatisme crânien, sclérose, amputé, paraplégique etc…) Il y a chaque jour « des bonjours », des « bonne journée » lancée par habitude, il y a parfois des sourires (derrière le masque), des yeux qui se parlent plus longuement et qui s’encouragent, des discussions qui deviennent plus longues de jours en jours (parfois des monologues!), des confidences, des choses qui se comprennent à demi-mots, des points communs qu’on se trouve (le même jour de naissance de son 1er enfant, le même nom qui devient une « joke », le même accident…) et des échanges toujours encourageants…
Parfois, les discussions en salle de rééducation finissent en échange de gourmandises… Un simple exercice de tenue de sacs de course peut finir en publicité pour les délicieux oursons de Cyril Lignac! On partage parfois aussi des douceurs, crêpes, cheesecake ou cookies! Certains exercices ou matériels prennent des noms particuliers inventés pour se motiver, quand l’espalier devient les « barres » et qu’on lance « on va au bar(re) », l’exercice devient tout de suite plus abordable et drôle!
Il y a ses compagnons qui nous montrent le chemin du courage, ceux qu’on appelle Rocky, ceux avec qui un simple regard ou un effort raté va finir dans un fou-rire, ceux que tu vas avoir envie de plus protéger par de simples attentions, ceux et celles qui ont fait un bout de chemin et avec qui ta rééducation a vraiment eu l’air de retrouvailles quotidiennes avec des collègues de travail ou parfois même des ami(e)s… Il y a ces checks personnalisés et ces numéros échangés qu’on écrit dans son répertoire avec un prénom et HDJ comme si on acceptait et que cet amitié faisait partie de cette histoire…
Il y a ces moments magiques où tu vois un compagnon se lever pour la première fois de son fauteuil, appareillé parfois, suspendu comme un pantin fragile mais plus fort dans son âme que n’importe quelle marionnette! Tu en vois parfois aussi pour la première fois déambuler avec leur chariot et doucement en quelques semaines n’avoir besoin plus que de béquilles… Tu observes par moment cette cour des miracles et une boule au fond de ta gorge se serre en voyant ce spectacle lent et pleins d’ambitions… Ta force, tu la puises aussi dans ces instants hors du temps émotionnellement fort…
Il y a ces départs, ces nouveaux départs pour tes compagnons synonyme de progrès et de renouveau pour chacun, il y a parfois un petit vide qui s’installe mais qui se comblera par de nouveaux souvenirs et par ceux qui resteront toujours! J’aurai pu nommer chacun de mes compagnons mais je préfère laisser tout cela anonyme, chacun se reconnaîtra dans ces anecdotes et saura à quel point il aura poser les petits cailloux sur mon propre chemin de rééducation! Il y a et il y aura… C’est loin d’être fini!
